Rencontre avec Benoît Cerexhe

Le quadrilatère Saint-Michel se trouve à la lisière de trois communes : Etterbeek, Woluwé-Saint-Lambert et Woluwé-Saint-Pierre. Géographiquement la propriété est située à cheval sur Etterbeek et Woluwé-Saint-Pierre. L’occasion pour la rédaction d’Horizons de rencontrer en bon voisin Benoit Cerexhe, nouveau bourgmestre cdH de Woluwé-Saint-Pierre et ancien élève de notre institution. Benoit a donc reçu de façon fort conviviale Amaury Arnould et son ancien condisciple Baudouin Hambenne pour une rencontre remplie de souvenirs mais résolument tournée vers l’avenir !

Horizons : C’est un honneur mais surtout un plaisir de retrouver un ancien élève à la carrière si bien remplie. Beaucoup connaissent bien l’homme politique, mais ils sont moins nombreux ceux qui ont l’occasion de découvrir la personne humaine qui se cache derrière l’élu. Horizons te remercie d’avoir accepté de nous révéler quelques facettes plus personnelles de ton parcours scolaire, de ta vie familiale et de tes nombreux projets. Back to the future donc ! Benoit, un mot sur ta famille pour commencer ?

Benoît : J’ai 52 ans, marié, j’ai la chance d’avoir deux filles de 19 et de 22 ans, Barbara et Virginie, qui ont toutes les deux étudié au Collège et qui poursuivent toutes deux leurs études universitaires. Mon épouse, juriste, est très investie dans sa carrière professionnelle.

Horizons : Ce qui est au cœur de notre rencontre aujourd’hui, c’est le Collège Saint-Michel. Quelle place occupe-t-il dans ta vie ? Quels souvenirs en gardes-tu ?

Benoît : Je suis arrivé en quatrième primaire au Collège. Puis j’ai eu la chance de me trouver dans la dernière année où le Collège organisa des humanités bilingues (concrètement les cours de géographie et d’histoire étaient donnés en néerlandais durant les trois premières années d’humanités). Je suis sorti du Collège en 1979. Mon titulaire de rhétorique était le Père Pilette, un jésuite d’une culture et d’une humanité extraordinaires. J’étais en section Latin-Grec. Mes cours préférés ont toujours été le latin, le français et les langues, moins les mathématiques et les sciences. Je dois à la vérité de dire que j’ai été un élève turbulent et dissipé et encore c’est un euphémisme !

En primaires, je garde le souvenir d’un instituteur qui m’a énormément marqué, Monsieur Monfort. Cet homme m’a appris à écrire sans fautes. C’est pour moi une qualité essentielle : l’orthographe reste la carte de visite d’une personne. J’ai de très bons souvenirs du Père Balon qui était à l’époque le préfet des primaires. En humanités, j’ai eu la chance de côtoyer une panoplie de professeurs de qualité. Je mentionnerai plus particulièrement le Père Collard, Monsieur René Faux qui m’a appris le latin, M. Lambillon (le papa de Michel Lambillon), M. Jacques Sibille et M. Pierre Baufay, tous deux férus d’histoire et éminents professeurs de latin et de grec.

Un des souvenirs que je garde de mon passage à Saint-Michel, c’est d’y avoir rencontré ceux qui allaient devenir mes meilleurs amis et je parle ici d’une amitié indéfectible que le temps et les circonstances n’ont jamais érodée. Et puis il y a bien sûr la qualité de la formation reçue. Le Collège nous donne les outils et les bonnes bases pour pouvoir bien affronter la vie, notamment en terme de capacités d’analyse. Intellectuellement c’est essentiel.

Je conserve énormément d’excellents souvenirs de mon passage au Collège qu’il m’est impossible d’énumérer tous ici, ainsi que  quelques anecdotes mémorables.

Horizons : Un mot sur ton parcours universitaire et professionnel ?

Benoît : Mon parcours universitaire a été très simple : des études de droit aux Facultés Universitaires Saint-Louis à Bruxelles et ensuite à l’UCL à Louvain-la-Neuve. Puis je me suis inscrit au barreau. J’ai été élu pour la première fois alors que j’étais encore étudiant à 21 ans (j’étais le plus jeune élu, puisqu’il fallait 21 ans pour pouvoir être éligible à l’époque). Ma volonté a toujours été d’exercer un métier à côté de mon engagement politique : c’est indispensable à mes yeux. La politique est une passion ; j’adore cela, mais je n’ai jamais voulu en faire un métier à part entière. Il ne faut pas être « un alimentaire de la politique », car cette vie est complexe. Dépendre de la décision d’un président de parti qui à un moment donné peut décider de votre avenir reste à mes yeux trop aléatoire. Exercer une profession permet également de rester en contact avec la réalité concrète du terrain. J’ai dû renoncer à cet engagement-là lorsque je suis devenu ministre de l’emploi, de l’économie, de la recherche scientifique et du commerce extérieur, en région bruxelloise parce que mes fonctions étaient trop prenantes et conserver une activité professionnelle privée pouvait générer en outre des conflits d’intérêt. J’ai été ministre pendant neuf ans, et j’ai abandonné cette fonction il y a un an en devenant bourgmestre de Woluwé-Saint-Pierre.

Horizons : Varions l’approche. 10 questions, 10 réponses rapides pour mieux cerner l’homme derrière le politicien. Si on te demande de retenir un ouvrage marquant à tes yeux.

Benoît : « Au nom de tous les miens », pour la force de vie qui ressort du parcours tragique de Martin Gray.

Horizons : Un film ?

Benoît : « Il faut sauver le soldat Ryan », pour les mêmes raisons.

Horizons : Un ou une chanteuse préféré(e) ?

Benoît : Je suis un fan inconditionnel de Patricia Kaas. Je ne résiste pas au timbre magique de sa voix cassée.

Horizons : Un personnage historique ?

Benoît : Nelson Mandela. Qui est capable de faire ce qu’il a fait ?

Horizons : Un homme politique belge ?

Benoît : Pierre Harmel, pour son sens unique de l’intérêt général : c’était un « sage ». Herman Van Rompuy également, pour son intelligence et son sens du compromis à la belge.

Horizons : Ta plus grande fierté ?

Benoît : Sans hésitation : mes enfants !

Horizons : Un talent que tu regrettes de ne pas avoir ?

Benoît : Celui d’être musicien.

Horizons : Un jour de repos, tu fais quoi ?

Benoît : (Cela n’existe pas !) Je fais les marchés si sympathiques de nos communes et je termine en assistant à un match d’Anderlecht au stade Constant Vanden stock.

Horizons : Ton endroit préféré à Bruxelles ?

Benoît : Soit le quartier Dansaert – Saint-Géry, qui a été complètement réhabilité, soit le parc de la Woluwe, car c’est une chance incroyable d’avoir un tel écrin de verdure en plein cœur de la capitale de l’Europe.

Horizons : Un ticket d’avion « découverte », vers quel endroit ?

Benoît : Barcelone, car tout s’y trouve : un patrimoine architectural, des musées, la mer, le shopping, et mes cousins espagnols !

Horizons : La question que tu aurais préféré qu’Horizons ne te pose pas ?

Benoît : Le décret inscription…

Horizons : La question que tu attends qu’Horizons te pose enfin ?

Benoît : « Que vas-tu faire du décret inscription ? ». Le modifier et l’adapter pour tenir plus compte du projet pédagogique de l’école dans les critères de choix des parents.

Horizons : Poursuivons notre entretien en revenant à la politique. S’il te fallait définir trois priorités pour la région bruxelloise, que mettrais-tu en avant ?

Benoît : Ce qui est fondamental à Bruxelles, c’est de pouvoir y maintenir une jeune classe moyenne. Aujourd’hui on a une croissance de la population en région bruxelloise, mais on continue à avoir un exode des classes moyennes. Dans l’évolution du pays, les régions vont être de plus en plus dépendantes de leurs ressources propres, de l’impôt que les gens payent sur leur lieu de domicile. Si Bruxelles continue à s’appauvrir, on ne pourra plus faire face aux défis en matière démographique : construction de logements, d’écoles, de crèches. Il est donc important de fixer une jeune classe qui travaille et qui habite à Bruxelles. Cela doit se faire au travers de toute une série de politiques qui développent la qualité de vie à Bruxelles : mobilité attrayante, infrastructures sportives adéquates, crèches et écoles de qualité à proximité.

Le deuxième enjeu, c’est la problématique de l’éducation et de la formation. Sur les 110.000 personnes qui cherchent aujourd’hui du travail à Bruxelles, 65% n’ont pas de diplôme d’humanités et 90% sont unilingues francophones. Il y a de l’emploi à Bruxelles, mais de l’emploi qualifié, et souvent nos jeunes ne sont pas assez qualifiés pour avoir accès à ces emplois-là.

Le troisième enjeu, c’est la politique de mobilité. Si on veut que Bruxelles soit viable, en ce compris économiquement, il faut faire des investissements colossaux dans la mobilité. Bruxelles étouffe du nombre de voitures et la situation ne fait que se détériorer : un Bruxellois sur deux a une voiture et tous les jours, 240.000 voitures déboulent dans Bruxelles. Il faut un investissement massif dans des transports en commun de qualité et principalement dans le métro et le RER.

Horizons : Te voilà aux commandes de Woluwé-Saint-Pierre : un défi que tu entends relever par quelles projets prioritaires ?

Benoît : Des projets de création de logements pour les jeunes tout d’abord, afin de faire en sorte que le jeune qui a vécu toute sa jeunesse à Woluwé-Saint-Pierre ne soit pas obligé de s’exiler de plus en plus loin de sa commune, en raison des prix des loyers ou des prix d’acquisition de nouveaux biens. Nous avons des projets de construction de logements à destination des jeunes ménages.

Ensuite, je voudrais créer un peu plus de convivialité et de lien social dans la commune. Tout en préservant la qualité de vie de la commune, il faut créer un peu plus d’animation, faire vivre cette commune. Par exemple en poursuivant ce qui a déjà été lancé : retransmission des matchs des Diables Rouges sur un écran géant à la Place Dumon, création d’un marché nocturne bio au Chant d’Oiseau, nuit des soldes, projet d’aménagement et de mise en valeur des places de la commune grâce à des concours d’architectes.

Un troisième défi est de développer fortement les infrastructures sportives. Des milliers de jeunes sont affiliés à des clubs sportifs (foot, hockey, etc.), mais la commune dispose malheureusement de trop peu d’infrastructures sportives. J’ai une série de projets en cours de réalisation dont certains pourraient même concerner le Collège Saint-Michel. A suivre !

Horizons : S’il fallait qualifier ton état d’esprit actuel ?

Benoît : Je suis très épanoui. Je rêvais à l’âge de six ans d’être bourgmestre. J’ai réalisé le rêve de ma vie ; je vis un rêve éveillé et j’en suis très content. Quand on aime la politique, il faut aimer les gens. Le niveau communal est le niveau où l’on a le contact le plus direct avec la population. C’est aussi un niveau de gestion très concret. Ce ne sont plus des grands dossiers de politique internationale, mais cela concerne la réalité concrète de milliers de personnes que l’on rencontre au quotidien, donc c’est gai et pragmatique.

Horizons : Benoît, nous arrivons au terme de notre entretien. Impossible de terminer sans te demander de prodiguer un conseil à nos Anciens en général et peut-être aux rhétos en particulier ?

Benoît : Qu’ils fassent ce qu’ils aiment. Il n’y a rien de mieux dans la vie que de pouvoir exercer sa passion. Qu’ils réfléchissent bien et qu’ils fassent quelque chose qu’ils ont envie de faire. Pour atteindre les objectifs que l’on se fixe, il est important de bien se former. Et c’est essentiel de réaliser que ce que l’on construit en rhéto et au sortir de celle-ci, c’est pour le reste de sa vie. La vie d’étudiant est certes très agréable, mais l’essentiel reste d’avoir une très bonne formation pour l’avenir et de bonnes connaissances linguistiques garantissant une vie professionnelle épanouissante. Quant aux Anciens, je pense qu’ils ont une grande responsabilité, celle d’aider les plus jeunes générations à aborder l’avenir de la façon la plus sereine possible. En cela, l’AESM doit être un élément moteur !

Horizons : Nous te remercions, Benoît, pour la sincérité de tes réponses qui reflètent, on le sent, ton engagement et ton dynamisme quotidiens. Nous te souhaitons bon succès et de garder toujours le lien privilégié qui t’unit à ton ancien Collège.

Auteurs : Amaury Arnould (ADS 2007), Rédacteur en chef, et Baudouin Hambenne (ADS 1980), Professeur titulaire de rhétorique et corédacteur en chef

 

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