Du train partant d’Aywaille chargé de charbon… à l’or de Saturne

Aussi loin que je me souvienne de ces années sur les bancs en bois du Collège (j’y suis entré en 4e primaire en 1973), j’ai toujours été fasciné par l’histoire. Enfin, plutôt par les histoires. Là où bon nombre de mes petits camarades se passionnaient alors pour leur collection de chinoises (les billes), pour le foot dans la cour de sable, pour ma part, savoir combien de kilos de charbon emporterait, à vitesse constante, le train parti de la gare d’Aywaille à 15 h me motivait moins que la locomotive crachant sa fumée blanche et transportant aussi vers des contrées sauvages un capitaine dont, par ailleurs, l’âge ne m’intéressait nullement.
Cet intérêt et ce goût de l’imaginaire ne m’ont jamais quitté. En 1ère humanité latine, chez le RP Beaufays, dans une version latine, un loup traquait gaillardement un agneau. Ma traduction devint surréaliste quand je confondis ovis (agneau) et avis (oiseau). Même si ce loup, sur le moment, me paraissait loufoque – aujourd’hui on dirait complètement à la masse – à vouloir croquer ce malheureux petit volatile, je trouvais in fine cette histoire décalée bien plus savoureuse !

Les années passèrent, avec e.a. Philemon & Baucis et toutes les grandes épopées classiques qui continuèrent d’irriguer mon imaginaire. Celle de la Mort qui n’en finissait pas d’achever Didon après 1450 vers, Juvénal, la caverne de Platon, les « Usque abutere Catilina patientiam nostram » canassons ! (Notez, Enée aurait pu dire la même chose à Carthage à propos de sa presque feu bien-aimée…) ; sans parler évidemment des grands récits de la littérature, les pendus de Villon, les filles de feu de Nerval, le père Goriot, le bossu de Victor Hugo, le maître du feuilleton. Etc., etc.

Bref, pour faire court (tautologie, c’est cadeau !), ces onze années au Collège sédimentèrent, un peu à mon insu, des couches de récits (et de dramaturgie) diverses que je complétais chez moi par d’autres maîtres plus hétérodoxes comme Gotlib, Goscinny, Charlier, Frédéric Dard, …

Bon, je l’avoue, mes premiers récits personnels ont été griffonnés sur des cahiers de cours, avec quelques phylactères. Ils sont restés compilés dans mes tiroirs. A Saint-Michel, j’ai aussi découvert le théâtre et le jeu (Docteur Knock à la salle bleue, Cyrano dans les combles avec M. Angenot), les pièces au Théâtre Poème et à Paris avec M. Smoes, etc. Ces récits-là,  et leur mise en scène m’ont aussi ouvert l’esprit à de nouveaux horizons de traverse.

Après des études de droit, à l’heure des choix professionnels, ma Muse créative que j’avais remisée à la cave – pour des raisons par trop conventionnelles je m’en aperçois aujourd’hui – revint frapper à ma porte. Elles sont comme ça les Muses. Faut pas trop les museler.  J’ai donc, à mon tour, frappé à la porte d’une agence de publicité pour devenir…publicitaire puis, dans ce parcours-là concepteur-rédacteur (copywriter en latin). J’y appris comment développer, structurer, exprimer et…vendre une idée.

C’est ainsi que, parallèlement à cette créativité à vocation commerciale, j’ai repris mes cahiers.

Une nouvelle primée dans un concours – et par la suite éditée –  fut l’incident déclencheur. Dans la foulée, je suivis quelques ateliers d’écriture de scénario. Je plongeai dans les classiques de la dramaturgie pour commettre un scénario de film d’action bankable sur le marché américain. Forcément un blockbuster ! Enrichissante (intellectuellement)  mais tortueuse odyssée même si pas réalisée mais peu importe. L’important était d’ouvrir une nouvelle porte (et satisfaire les appétits gloutons de celle qui…). Je délaissai provisoirement alors la voie (compliquée) du scénario de film pour écrire un roman. Un vieux rêve. Là aussi, expérience intéressante d’être confronté au circuit éditorial. « Millefeuille » existera finalement diffusé dans le monde entier…sur Internet. Sans regrets. Que du contraire car, grâce à la complicité d’un ami diffuseur de livres, cette année-là, grâce à Millefeuille (relié) les portes de la Foire du livre me furent ouvertes, comme auteur officiel. A cette occasion un peu inespérée, allant chercher mon badge,  je croisai Simon Casterman, des prestigieuses éditions éponymes, lui-même agrafant ledit badge à son veston. Je sais lire. Mon Millefeuille (400 pages) en main, avec mon sésame, nous avons discuté quelques instants. Brisé la glace, sans plus. Quelques mois plus tard, par le plus grand des hasards, nous nous revoyons à nouveau à un BBQ d’école (il avait inscrit un de ses enfants dans la même école que les miens…). Entre deux rosés et un boudin (la saucisse), il me demanda si j’écrivais toujours des histoires. Des histoires ! Evidemment. Si je n’étais pas intéressé par un scénario de bande dessinée pour un épisode de Loïs Lorcey. Une des séries du grand Jacques Martin, à l’époque de Louis XIV.  Simon Casterman cherchait en one shot une bonne histoire.  Il suffit de passer le pont. Je me lançai donc à l’aventure. Pas sans biscuits tout de même (dans ma …musette). Mais avec ma solide culture BD, une certaine culture générale acquise AMDG et aussi mes expériences de structuration du récit. Quelques mois plus tard, le comité éditorial acceptait mon projet. C’est ainsi – je passe les détails du processus pour faire court – que sortit « Dans les griffes du Faucon ».

Puis un second album « La Prisonnière de l’Archange » (Saint-Michel, bien sûr !) Exercice passionnant que de voir un dessinateur mettre en phylactères, en images et en couleurs des idées (et des dialogues, un découpage, etc.) extraits – non de la cuisse de Jupiter, modestie oblige – mais de mon imagination.

Dans la foulée de ces travaux au sein de la maison d’édition, je proposai une idée pour un épisode d’Alix à l’équipe éditoriale qui Pilote (clin d’oeil…merci Goscinny, mon maître) toutes les séries de Jacques Martin. Sur cette série-phare, plusieurs équipes de dessinateurs et de scénaristes travaillent en relais (Il faut plus d’un an et demi de l’écriture à l’édition finale). Il y avait cette année-là une « place » disponible dans leur agenda de production.  Alea jacta est ! L’idée plaisait à l’équipe (dessinateur, éditeurs et ayants droit de Jacques Martin, décédé en 2010). C’est ainsi qu’est né progressivement le 35e album : « L’Or de Saturne », excellemment dessiné par Marco Venanzi. Et scénarisé par Pierre Valmour, mon pseudonyme repris à mon grand-père historien (et écrivain du dimanche), ADS 1907. L’album sortira le 28 octobre. A Aywaille et un peu partout dans le monde.

Comme quoi … perseverare humanum est !

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