Deux AESM mis à l’honneur dans le très riche numéro de septembre dernier de la Revue générale n°2022/3
Georges Lemaître (1894-1966) et le Big Bang,
Anthony de Meeûs (1929-2019) et les Cahiers du Samizdat.
https://pul.uclouvain.be/book/?gcoi=29303100731900
Ce numéro est d’abord consacré au chanoine Georges Lemaître, promoteur de la cosmologie relativiste moderne fondée sur le concept d’expansion de l’univers, reconnu internationalement comme le « père du Big Bang ».
L’« Einstein belge » suivit à Saint-Michel une année de spécialisation en mathématiques avant d’être admis à l’Université de Cambridge comme étudiant-chercheur en physique et de devenir l’un des plus grands hommes de science du XXe siècle : on ne le présente plus, bien qu’il soit très loin d’être reconnu à sa juste valeur. La Revue entend participer à ce rectificatif avec une impressionnante palette de contributions dues aux meilleurs experts et en rendant la parole à Lemaître lui-même.
Le deuxième Ancien, lui vraiment par trop méconnu, fut élève du collège en 1947, et nous a quittés près de vingt-huit ans après l’effondrement de l’URSS ratifié par Mikhaïl Gorbatchev en direct à la télévision moscovite. Le 9 octobre 2019 en effet, à Grez-Doiceau, entrait pieusement dans la paix du Seigneur le comte Anthony de Meeûs, né le 12 janvier 1929 à Auderghem, l’un des principaux artisans, dans l’ombre, de la chute d’un impitoyable système totalitaire qui se croyait promis à l’éternité. Cet homme aussi extraordinairement humble qu’il était extraordinairement résolu dans son combat quasi singulier contre le totalitarisme fut, avec Simon Leys et Jerzy Lukaszewski, l’un des trois grands militants belges des droits de l’Homme dans la seconde moitié du XXe siècle. En septembre dernier, nous avons commémoré le cinquantenaire de la création par lui des Cahiers du Samizdat (1972-1988), l’unique édition mondiale en français des écrits que les dissidents parvenaient à transmettre au monde libre au travers des mailles du Rideau de Fer, les samizdats.
La Revue de septembre, après Lemaître – dans un article écrit par moi-même- rend un hommage également mérité à Anthony de Meeûs. Du fondateur des Cahiers du Samizdat, l’on retiendra qu’il fut l’artisan d’un épisode de la Guerre froide digne d’un thriller d’espionnage: l’échange, en 1976 sur le tarmac de l’aéroport de Zürich, du grand dissident soviétique Vladimir Boukovski contre l’ancien leader du PC chilien, Luis Corvalán. Anthony de Meeûs fut avant tout un pionnier de la lutte contre l’usage répressif de la psychiatrie en URSS et dans le monde, à l’origine du processus qui mena à l’adoption en 1977, par l’Association mondiale de psychiatrie, de la Déclaration de Hawaï I, base du code d’éthique actuel de psychiatrie et du Comité de révision des abus de la psychiatrie (abus hélas toujours d’actualité sous maints régimes autoritaires).
Si Anthony de Meeûs a joué un rôle crucial et méconnu dans la révélation de la barbarie du système répressif soviétique, il fut également un précurseur avant la lettre de la neutralité sur l’Internet et un acteur en première ligne de la lutte contre la désinformation totalitaire. La leçon de son action inlassable pour la vérité, la justice, la réconciliation des peuples et la reconnaissance de la vocation européenne de la Russie résonne avec une force singulière en ces temps incertains. En ces temps où l’Empire post-soviétique tente de renaître de ses cendres en déchaînant un déluge de fer et de feu sur l’Ukraine et menace l’Occident d’une guerre totale.